Sémaphore oecuménique
Sémaphore œcuménique
Vous connaissez peut-être la plaisanterie -un peu bête, mais
pas méchante- autour des feux de circulation qui bordent nos routes. Pour les
Allemands, ils sont impératifs ; pour les Français, ils sont
indicatifs ; pour les Italiens…décoratifs ! Et pour les
Suisses ? me direz-vous. Eh ! bien, ça dépend des cantons!
Et voilà -bizarre !- qui me fait penser à l’enjeu oecuménique
du prochain Synode romain sur la synodalité comme chemin de « communion,
de participation et de mission » dans notre Eglise. Comme jadis lors du
Concile Vatican II (1962-1965), le pape actuel a invité des observateurs des
autres Eglises chrétiennes pour ces assises réparties sur deux années. C’est
dire que la dimension œcuménique est non seulement souhaitée, mais aussi
pleinement assumée. Mais comment ?
Si la présence de ces délégués est limitée à des échanges de
type diplomatique, le feu rouge va dominer les débats. La forteresse catholique
va se renforcer dans la conscience d’être la seule véritable Eglise du Christ.
On peut aussi imaginer que les participants venus d’ailleurs puissent
s’exprimer librement et soient écoutés et même entendus. C’est le feu orange
des clignotants de l’espérance œcuménique. Il faudrait alors continuer le
dialogue, aussi rapidement que possible et aussi lentement que nécessaire !
Et si l’on passait à une vitesse supérieure, celle qu’implore
la prière de Jésus pour son Eglise « Que tous soient un afin que le monde
croie !» (Jn 17,21). Ce serait un feu vert qui consonnerait parfaitement
avec le thème même de ce synode. Car son dessein réformateur implique
l’œcuménisme en son cœur vivant et vibrant.
La synodalité, c’est s’enraciner tous ensemble dans l’unité
essentielle telle que l’évangile la promet et la promeut, à savoir sur le
modèle trinitaire, qui marie cette unité basique avec des diversités légitimes
et même désirables.
Incontestablement, dans l’Eglise catholique, l’ADN de l’unité
a dominé au cours de son histoire. Elle est servie surtout par le ministère de
l’évêque de Rome « principe perpétuel et visible, et fondement de
l’unité », comme le rappelle le concile Vatican II. (Lumen gentium no 23). Encore faut-il que le
pôle de la diversité, en toutes ses richesses possibles, soit aussi honoré et
favorisé. Le centralisme romain n’a-t-il pas confondu parfois l’unité et
l’uniformité ? La redécouverte de la synodalité, qui inclue un certain respect
des différences et un juste usage du principe de subsidiarité, ne fournit-elle
pas une opportunité providentielle pour bouster la réconciliation entre
Eglises ? Pas au détriment de l’unité théologale dans la foi au Christ,
mais par l’accueil de nouveaux témoignages de la riche fécondité évangélique.
On devrait la constater avec reconnaissance, que ce soit dans les expressions
de cette foi, dans la beauté des spiritualités et liturgies, dans la variété
des ministères, dans la mosaïque des implantations culturelles.
Pour progresser sur ce chemin d’une plus grande fidélité au
message christique, nous avons besoin les uns des autres. C’est ce que le pape
saint Jean-Paul II avait compris quand, à propos de son office singulier, il
invita humblement les autres Eglises à lui venir en aide pour que ce ministère puisse
enfin être perçu comme un service d’amour universel. (Ut unum sint no 95).
Quelle image l’Eglise catholique donnera-t-elle d’elle-même à
la fin du synode (2024) ? Feu rouge à l’immobilisme du statu quo? Feu
vert à la communion inclusive, en vue de la mission renouvelée dans notre monde,
en tendant une main fraternelle aux autres Eglises ?
Autant de grâces que nous pouvons nous préparer à recevoir de
l’Esprit, en transformant nos ardents désirs en ferventes prières.
Claude Ducarroz
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