Homélie Premier dim. Carême 21

 

Homélie   Marc 1,12-15

Premier dimanche de Carême 2021

C’est le Covid. Ou du moins, ça y ressemble. Pour Jésus, après son baptême, c’est la quarantaine – 40 jours-. Et pas n’importe où : dans le désert. Poursuivi par Satan, ce qui est plus pervers qu’un méchant virus. L’environnement ? Des bêtes sauvages, telle était la compagnie de Jésus. Au menu ? Le jeûne intégral. Je vous souhaite agréable séjour et bon appétit. Qu’est-ce que nos restrictions covidées à côté de l’austère stage de Jésus dans la solitude du désert de Judée ?

Mais attention ! Car la comparaison s’arrête bientôt. C’est l’Esprit qui poussa Jésus au désert. Il s’agissait pour le Messie de répéter -personnellement et symboliquement- le séjour du peuple d’Israël dans ce désert, avant son arrivée dans la terre promise. Mêmes tentations, mêmes épreuves.

Mais il faut surtout retenir l’avant et l’après, dans une logique de préparation à l’adversité, et de résilience après la tribulation.

Jésus n’entre pas démuni dans la détresse du désert. Il vient d’être baptisé, il est rempli de l’Esprit Saint. De quoi affronter Satan lui-même, non sans pièges et combats, certes, mais aussi avec des énergies venues de l’intérieur.

 Emergeant de son Covid particulièrement sévère -un vrai Carême-, Jésus n’en est que plus fort pour mener à bien sa difficile mission : sortir au large, vers les périphéries, annoncer l’Evangile, qui est certes une bonne nouvelle, mais qui implique aussi une radicale conversion et du cœur et de la vie. Et à son horizon pas si lointain : le mystère pascal, la croix et la résurrection.

Peu ou prou, nous sommes tous des covidés, certains physiquement, d’autres socialement et même économiquement, et probablement spirituellement. Il n’y a qu’à repérer de quoi on parle partout, de quoi on se plaint surtout, qui on accuse beaucoup.

Le Carême vient de commencer. Cette année, il n’est pas tout à fait comme les autres. C’est un temps fort sans carnaval préalable, et surtout une période certainement marquée par cette épreuve nommée corona, qui nous touche personnellement, ou dans nos plus proches ou nos plus chères relations humaines.

 Dans cette calamité -qui peut être douloureuse, voire cruelle-, nous ne sommes pas seuls, Car nous demeurons des humains aimés de Dieu qui chérit ses enfants, nous avons des vigueurs baptismales éclairées par la parole de Dieu et fortifiées par les sacrements. Nous avons même l’assurance de pouvoir pousser notre espérance vitale jusqu’au-delà de la mort, à cause de la résurrection du Christ, pour nous-mêmes et pour ceux dont nous pleurons la perte ici-bas.

 Mais peut-être que ce Carême arrive opportunément pour nous inviter à creuser en nous jusqu’à nos puits intérieurs par la prière et le silence habité, surtout si nous nous sentons vulnérables, fragiles, menacés. Chercher au-dedans ce que nous cherchions trop souvent au dehors. Quitter nos superficialités épidermiques, aller jusqu’à l’âme, en passant par le cœur.

Et puis il nous faut l’admettre et peu à peu l’intégrer à notre mentalité et à notre pratique : nous ne sortirons pas de notre tunnel covidé – à l’instar de Jésus après son passage au désert- sans remettre en question beaucoup de certitudes et quelques habitudes. Et ça peut être pour notre bien, celui de l’Eglise, celui de la société. Il y a des conversions à opérer d’urgence.

Avons-nous encore le sens de la communauté des croyants dans une Eglise qui doit devenir plus fraternelle, plus participative, moins hiérarchique, moins cléricale ?

Avons-nous acquis des réflexes plus solidaires – moins égoïstes-  face aux problèmes à résoudre, y compris dans l’économie, la politique, l’écologie, tout près de chez nous, mais aussi à l’échelle du vaste monde ?

Savons-nous encore miser sur les grandes joies des petites beautés du quotidien, qui peuvent et doivent nous fournir ou nous rendre le courage d’affronter la vie avec ses misères, sans sombrer dans le désespoir ?

Finalement, la véritable et durable santé humaine, ne serait-ce pas la force de continuer d’aimer et le bonheur d’être aimé, quoiqu’il arrive, quoi qu’il nous arrive ?

Quelqu’un est venu nous inoculer le plus merveilleux des virus, Celui qui a dit, tout en le démontrant d’abord lui-même, : Aimez-vous les uns les autres comme je vous aime… Alors ma joie sera toujours en vous, parce que cette joie-là, personne ne pourra jamais vous l’enlever.

Bon Carême !

 

 

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