Homélie de Noël 2020
NOEL 2020
Felices
Pascuas de Navidad !
Joyeuses
Pâques de la Nativité !
Dans la
tradition espagnole, c’est ainsi qu’on se souhaite « Joyeux Noël ». Il y aurait donc deux fois Pâques, l’une à
Noël et l’autre à la fête de la résurrection du Christ. Qu’en
pensez-vous ? Mais aujourd’hui, c’est Noël, me direz-vous !
En fait,
que s’est-il passé à Bethléem de Judée, il y a environ 2000 ans ?
L’évènement est entouré de bien des mystères. Le village est assez certain,
mais le lieu précis l’est beaucoup moins. Et la date encore plus problématique.
Le 25 décembre est une date fixée seulement au début du 4ème siècle,
pour commémorer la naissance du Christ « lumière du monde » afin
d’essayer de supprimer les fêtes païennes dédiées au « soleil invaincu »,
parce qu’au solstice d’hiver l’astre du jour remontait courageusement à
l’horizon, et suscitait bien des débordements festifs.
Et
d’ailleurs cette nuit-là, 25 décembre ou un autre jour, peut-être même à côté
de la famille pèlerine venue de Nazareth, d’autres bébés sont nés, dont plus
personne ne parle. Pourquoi celui-là a-t-il traversé l’histoire pour parvenir
jusqu’à nous, au point de nous rassembler dans cette douce et sainte nuit ?
Parce
qu’il y eut deux naissances dans la vie de ce Jésus de Nazareth, celle de
Bethléem que nous commémorons maintenant, et celle du matin de Pâques, la plus
importante, qui a tout changé dans son existence, et qui peut et veut tout
changer dans nos existences à nous. C’est pourquoi nous sommes tous impliqués,
quelle que soit la date de notre naissance.
Aujourd’hui,
c’est la première naissance. Dans la personne humaine de Jésus, fils du Père et
fils de Marie -sans oublier Joseph-, Dieu est venu charnellement au
monde ; l’Eternel est entré dans le temps, le nôtre, dans notre dramatique
Histoire et nos petites histoires ; le Tout-Puissant s’est montré dans
l’impuissance silencieuse d’un bébé ; le riche de toute gloire gigote dans
une crèche, une mangeoire pour animaux ; la perfection de toutes les
qualités suprêmes -que tous les philosophes déclinent en balbutiant-, voilà
qu’elle est là, blottie dans le sourire d’un nouveau-né, simplement disponible
pour les regards émerveillés de pauvres bergers sortis de leurs implacables marges
sociales.
Il fallait bien des anges chanteurs et
musiciens pour aider ce petit peuple à dépasser des apparences si
déconcertantes. Et comment comprendre un tel mystère, l’incarnation du Fils de
Dieu dans la fragilité d’un enfant, né d’une femme, avec toutes les faiblesses
de notre condition humaine ? Nous le savons maintenant, ou plutôt nous le
croyons : seul un Dieu-Amour, amour en lui-même infiniment, et amour pour
nous obstinément, peut inventer – divinement et humainement- une telle advenue
vers nous, une telle naissance au milieu de nous, une telle présence auprès de
nous.
Et nous
maintenant, maintenant qu’il est venu « pour nous les hommes et pour notre
salut », maintenant qu’il est né à cause de nous, qu’il demeure avec nous :
comme nous avons besoin, n’est-ce pas ?, nous aussi, de naissance et de
renaissance ! Oui, de nous laisser « naître » un peu comme lui,
par la puissance de l’Esprit-Saint, et de nous laisser déposer et reposer dans
les tendres bras de sa mère et notre mère, Marie.
Telle est
notre aventure baptismale et ecclésiale, qui fait de nos pauvres humanités des
terres offertes pour la re-naissance qui nous vient de ce sauveur, de la crèche
à sa croix.
Et comme
l’Eglise, la nôtre en particulier, a aussi besoin de naître et de renaître, de
passer par un Noël d’évangile vécu, après plusieurs épreuves par Covids
spirituels. Oui, un ardent renouveau svp, à la lumière de cette Parole faite
chair, qui nous parle dans les Ecritures et qui se partage fraternellement dans
le Pain eucharistique, là, sur la nouvelle crèche de l’autel, en attendant de
descendre dans celle de nos cœurs, par la plus pascale des communions.
Et comme notre humanité, blessée par une
certaine pandémie et infectée par tant d’autres virus, -ceux de la violence et
de l’injustice-, a besoin, elle aussi, de naître et de renaître par
l’engagement courageux des hommes et femmes de bonne volonté, auxquels les
anges de Noël ont annoncé et promis la paix.
Fermons
les yeux après avoir contemplé la crèche. N’entendons-nous pas, au fond de nos
coeurs, dans les douleurs d’une l’Eglise enceinte de l’Esprit et dans les
convulsions de notre société, l’appel pathétique à l’autre naissance, à l’autre
accouchement, à la Pâque nouvelle et éternelle, à l’alleluia universel ?
Car c’est pour cela qu’il est venu au premier Noël, pour réussir le second,
pour nous et avec nous.
Après ce
que beaucoup appellent « les fêtes », souvent sans même savoir de
quelles fêtes il s’agit, que les chrétiens -au moins eux- gardent leur
espérance enracinée dans la grande naissance pascale, celle qui fortifie nos pénibles
renaissances personnelles, celle qui réforme l’Eglise en laborieux pèlerinage,
au milieu de cette humanité tragique, et pourtant promise au Royaume de Dieu.
Oui,
quand Dieu sera tout en nous et tout en tous, comme il fut et demeure tout en
Jésus, notre Seigneur et notre frère, celui de Noël et celui de Pâques.
Felices
Pascuas de Navidad. Joyeuses Pâques de la Nativité.
Claude
Ducarroz
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